Dieu au centre Homélie Veillée pascale (8.04.2023)
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Veillée pascale samedi 8 avril 2023 Ste MarieMadeleine Gennevilliers
Dieu au centre
A 17 ans, Madeleine Delbrêl disait « Dieu est mort. Vive la mort ! » Elle ne s’attendait pas sans doute à la vie qui serait la sienne ! Et le Dieu dont elle disait la fin comme quelques autres avant elle Lui a fait vivre de drôles d’aventures ! Quelle vie bouleversée ! Je pense aussi à beaucoup d’autres, dont certains devenus des saints ! Saul de Tarse, Augustin, Charles de Foucauld, des blasphémateurs, des francs-maçons, des satanistes. Regardons comment Dieu s’y prend !
Dans le récit de la création par la Parole de Dieu en six jours, nous avons un jour préféré. Quelle bonté de Dieu, quelle puissance tout en douceur dans l’infiniment grand et l’infiniment petit (cf B Pascal Pensées). Qui est au centre ? Ce ne sont ni l’homme et la femme qui sont les seuls créés à l’image et pour la ressemblance de Dieu, ni le grand astre du jour, le soleil. C’est le Seigneur dont la Parole est agissante comme dans les sacrements.
Dans la montée vers la montagne où Abraham doit attacher son fils, l’unique, celui de la promesse et de la vieillesse, comment le Seigneur pourrait-il reprendre ce qu’il avait promis et donné ? A certains moments, nous pourrions oublier que nous sommes bénéficiaires de la création, de la vie, et nous risquons de nous prendre pour les propriétaires y compris de nos enfants à chaque fois que nous voulons les diriger, trop les protéger, les empêcher de tomber et d’apprendre de leurs erreurs, en oubliant la pédagogie divine. Le Seigneur nous fait confiance. Il confié aux parents un ou plusieurs enfants. Faisons-Lui confiance. Quand on se met à son service, et qu’on lui laisse prendre place dans notre voiture, non pas sur la banquette-arrière, ni comme copilote, mais en lui laissant le volant de notre vie, à la 1° place, il s’occupe de nos affaires. Il est le meilleur, quand nous Le lais-sons faire ce que nous ne savons ni ne pouvons faire.
Avec la fuite d’Egypte, c’est la fin de l’esclavage. Par le passage de la Mer Rouge, le Seigneur conduit son peuple d’un enfer à la vie en passant par le don de la Loi et de quarante années d’apprentissage au désert.
Avec le prophète Isaïe, nous découvrons un Dieu qui se fait tendresse, qui se compare à une femme, et même une femme abandonnée ! C’est surprenant, car il se compare à l’époux et son peuple à l’épouse ! Malgré tout, il continue à croire à son projet. Il espère plus que tout, plus que nous. Le Seigneur revient sur son projet de colère, comme Jonas le raconte pour les habitants méchants de Ninive que nous découvrions mieux lors du concert du 16 avril après-midi ! Ou comment il interpelle le prophète râleur qui voulait faire échouer sa mission, et comment Il s’obstine à garder le prophète qui ne croyait pas à la réussite d’un Dieu bon qui aime et qui veut sauver tous les êtres humains !
Avec Baruc, on retrouve ces mêmes harmoniques. A Babylone, les ossements morts des exilés peuvent revivre et se relever (cf Ez 37) s’ils arrêtent de tourner le dos au Seigneur, de passer de l’ouest comme Jonas fuyant en bateau à Tarsis, à l’est vers Ninive, de la mort à la vie. Pour cela, comme pour la transformation de la chenille en papillon, il faut passer par une mort réelle ou spirituelle pour renaître.
Lors de la résurrection de Jésus, il n'a rien fait ! C’est son Père qui l’a réveillé avec un réveil, euh non, par la Puissance de vie de son Esprit St. C’est son Père qui l’a relevé et mis debout alors qu’il était couché. Comme Jonas qui avait été jeté dans les eaux mortelles de la mer déchaînée puis récupéré par un gros poisson pour y vivre pendant 3 jours et 3 nuits avant d’être rejeté sur le rivage, Jésus a été libéré du suaire. Qui d’autre que son Père l’a vêtu avec son plus beau vêtement blanc, et a organisé une énorme teuf, pardon un grand festin au ciel avec l’arrivé du bon larron (cf Lc 23).
Ecoutons ce que Charles Péguy fait dire à Dieu et qu’il peut dire à Lucy et Sira, à chacune et chacun de nous : « C'est moi l’Artiste, dit Dieu ! Tu es mon vase d'argile. C'est moi qui t'ai modelé, façonné, … Une merveille au creux de ma Main ! Tu n'es pas encore achevé, tu es en train de prendre la « forme » de mon Fils. Voici que tu te désoles et que tu désespères parce que tu as pris quelques fêlures au contact des autres. Tu t'es heurté, tu as été ébréché, tu as même pu tomber par terre te briser et tomber en mille morceaux ! Fêlures, éraflures, lézardes, brisures, cassures, ratures, … N'oublie pas c'est ta condition de vase. Si je t'avais rangé dans un placard à vaisselle, tu ne connaîtrais pas ces heurts de la vie, mais tu ne servirais à rien, ni à personne ! Tu serais un vase inutile ! Moi, dit Dieu, j'aime les vieux vases, un peu usés, un peu ébréchés. Ils ont toute une histoire ! Et toi, tu voudrais être lisse comme un nouveau-né ? Je te connais, ô toi que j'ai façonné, pétri avec tant d'amour ! Je ne voudrais pas que tu te désoles de tes ratés ! Tu es fait de boue et de lumière ! Tu es fait pour servir ! Á ne regarder que tes failles, tes faiblesses et tes chutes, tu te centres encore trop sur toi-même et tu restes prisonnier de tes failles ! C'est moi l'Artiste et je m'y connais dans l'art de reprendre un vase. Laisse-toi faire ! Je suis l'Artiste, c'est moi qui moule, qui pétris, qui donne la forme. Toi, mon vase d'argile, viens te glisser au creux de mes mains paternelles, laisse-toi pétrir, abandonne-toi longuement à mon travail de potier. Expose-moi tes fêlures, tes brisures, tes cassures. J'aime à faire du neuf. J'aime à te regarder. Viens et n'aie plus peur ! Chaque fois que tu retombes dans ces fautes que tu voudrais ne plus commettre, je te dis : « Le pardon est là ! Viens et continuons ensemble ! » J'aime à te regarder, voir les efforts que tu fais et tout le mal que tu te donnes. J'en éprouve grande joie et tu réjouis mon Cœur ! Je vois combien tu te transformes. Á l'abri de tes regards, je te modèle à l'image du Fils bien aimé ! Tout ce que je te demande c'est de venir toujours et à nouveau, après chaque chute, entre mes Mains, pour me donner la joie de te remodeler. Allons, n'aie pas peur : C'est moi ton Père, c'est moi l'Artiste ! » (Charles Péguy)
Nous sommes « des vases d’argiles qui portons un trésor », des petites cruches maladroites. Père, Toi qui as ressuscité par ton Pardon tant et tant de tes enfants dont certains qui ne l’avaient pas demandé depuis si longtemps, Toi qui es vainqueur de la mort, du mal, du péché et du serpent-dragon, par l’intercession de l’archange St Michel, de St Georges, du curé d’Ars, de St Antoine du désert, de St Benoît et de tous ceux qui ont connu un combat spirituel fort, délivre définitivement les deux jeunes filles et la jeune femme que j’ai rencontrées ces dernières semaines, de tout esprit occulte et maléfique et ressuscite-les comme ton Fils a chassé les esprits mauvais de l’homme possédé qui vivait dans un cimetière (cf Mc 5, 1-13).
Gn 1,1 – 2,4a ; Gn 22 ; Ps 103 ; Ex 14,15 – 15,1a ; Ex 15 ; Is 54 ; Ba 3 ; Rm 6,3b-11 ; Ps 117 ; Lc 24, 1-12
P. Olivier Joncour