Rêves de rentrée (Homélie du 23° dim TO B 9.09.2018)

Dimanche 9 septembre 2018 23° dim TO B, St PP Colombes

Rêves de rentrée

A Tyr, Jésus vient de libérer à distance la fille d’une païenne, d’un démon. Il reprend ensuite la route, traversant rapidement la Galilée et se dirige au sud-est, à l’est du Jourdain, en Décapole, ce territoire païen de dix villes. Nous découvrons que la renommée de Jésus dépasse déjà la Galilée. Pas de réseaux sociaux, ni reportage télévisé sensationnel à l’époque, mais le bouche à oreille et les bonnes nouvelles ne connaissent pas les frontières géographiques, ni celles des coeurs. Et si, cette année, comme Jésus, je sortais de mon cercle de relations, de ma zone de confort. Et si le Seigneur me conduisait là où je ne m’y attendais pas, comme ont pu le vivre, ce samedi, les paroissiens qui ont tenu le stand paroissial rue St Denis, et ceux qui sont allés à la rencontre des Colombiens pour inviter au prochain Parcours Alpha, ou encore au Forum des associations.

Des gens amènent à Jésus un sourd […] et supplient Jésus.

Cet homme n’a jamais entendu les oiseaux ni parler de ce qu’avait déjà fait et dit Jésus, mais d’autres oui. C’est pourquoi, ils l’ont guidé vers le guérisseur des corps, des esprits perturbés et des coeurs. Ils ont eu l’audace et le courage de le faire. Relayons la proposition de Jésus qui veut être l’ami de tous ceux qui lui font confiance. Je pense à ce qui s’est passé dans notre église cet été. Une femme seule dont le père était mort n’arrêtait pas de pleurer de chagrin. Une autre que je ne connais pas lui a suggéré d’aller à la messe. Elle y est allée plusieurs dimanches de suite en juillet et août. Alors qu’elle pleurait, elle a aussi été accueillie. Elle a été invitée aux dîners Table ouverte de l’été les mercredi soir et au déjeuner du 15 août à la crypte, malgré son handicap qui l'oblige à se déplacer en fauteuil roulant. Quand je l’ai rencontrée fin août, elle avait retrouvé le sourire et une certaine paix d’avoir été intégrée dans une communauté. Elle s’appelle Alix.

Qui a été invité à venir prier à la messe alors qu’il n’en a pas l’habitude ? Pour cette année, je rêve que pour les inscriptions au catéchisme, chaque enfant amène à Jésus un ou une de ses amis. Je rêve que pour le Parcours Alpha qui commencera le 27 septembre, chaque paroissien invite une de ses relations, vienne dîner avec cette personne et participe à la discussion qui suivra le topo sur le sens de la vie. Je rêve que pour l’Aumônerie des jeunes, chaque collégien ou lycéen invite un de ses copains à venir voir et rencontrer qui est Jésus qui peut lui permettre de trouver et prendre sa place dans l’Église. Je rêve que plus de jeunes parents, et des moins jeunes, se réunissent en équipe chaque mois pour partager leurs questions, leurs joies et leurs difficultés, pour se soutenir. Je rêve que se développe une vraie culture de l’invitation, de l’accueil et de la prière pour les blessés de la vie.

Les gens ont demandé à Jésus de faire quelque chose pour le sourd-muet. Cet homme a eu la chance de ne pas être resté seul, d’avoir fait confiance à ceux qui l’ont conduit à Jésus. Je rêve que l’on puisse davantage nous confier nos fardeaux pour que nous puissions les présenter au Ressuscité de Pâques, pour que nous puissions présenter nos frères qui souffrent au travail, dans leur couple, ou qu’un enfant inquiète. Je fais le rêve que se développe la prière des frères à la fin de la messe à la chapelle de la Vierge.

Ouvre-toi !

Comme l’homme n’entend pas, il ne peut pas bien articuler. Cependant, Jésus lui parle, donne un ordre bref, tout en ayant les yeux vers le ciel. Jésus soupira : ce n’est pas de l’exaspération mais un écho du souffle de vie que le Seigneur avait insufflé en Adam (cf Gn 2,7b). Vient ensuite le paradoxe de l’après-guérison : alors qu’il peut parler correctement, Jésus lui demande de se taire ! Dans quel domaine de ma vie ai-je besoin que Jésus m’ouvre ?

Ceux-ci le proclamaient.

Les gens qui ont été témoins de la guérison ne peuvent s’empêcher de raconter à d’autres ce qui est arrivé. St Marc utilise ici le verbe qui servira pour l'annonce de la résurrection de Jésus. Et ces païens qui ne connaissaient pas les prophètes juifs citent Isaïe sans le savoir, comme nous l’avons entendu dans la première lecture.

Dites aux gens qui s'affolent

A l’époque d’Isaïe, c’est le petit royaume qui est envahi par Nabuchodonosaur et ses armées qui ont assiégé Jérusalem et détruit le temple. Et quand il est question ensuite de vengeance et de revanche, ce pas ce que nous imaginons : Dieu n’envoie pas ses armées, Il vient lui-même. Le désert stérile et mort verdit. L’ouïe, la vue et la parole sont guéries. Les oasis fleurissent dans le désert. L’eau coule abondamment comme la vision du prophète Ezéchiel qui voit sortir du côté du temple de Jérusalem reconstruit un ruisseau qui devient fleuve jusqu’à assainir la Mer morte (cf 47, ). Sur la croix, cette prophétie a été réalisée lorsque de l’eau est sortie du coeur transpercé de Jésus par la lance du soldat romain (Jn 19,34). Cette eau est si précieuse. Le Pape François y a consacré cinq paragraphes dans l’encyclique Laudato Si (n°27-31) et a attiré l’attention de la population mondiale dans son message du 1° septembre 2018 pour la Journée mondiale de prière pour la sauvegarde de la création : « l’accès à l’eau potable et sûre est un droit humain primordial, fondamental et universel, parce qu’il détermine la survie des personnes, et par conséquent il est une condition pour l’exercice des autres droits humains. Ce monde a une grave dette sociale envers les pauvres qui n’ont pas accès à l’eau potable, parce que c’est leur nier le droit à la vie, enraciné dans leur dignité inaliénable » (LS n°30).

Combien de temps allons-nous être sourds ? Combien de temps encore allons-nous rester muets ? Il ne suffit pas qu’un nouveau ministre de l’écologie soit nommé pour que tout change. Et l’Archevêque de Paris, à la suite de la Lettre du Pape François au Peuple de Dieu que je vous demande de lire sur le site de la paroisse, au sujet des abus sexuels, de pouvoir ou de conscience a écrit : « À la suite du pape François, j’appelle chacun à ne jamais choisir un silence complice avec le mal, en gardant toujours le sens de la responsabilité. » (Message de Mgr Michel Aupetit aux fidèles du diocèse de Paris à propos de la lettre du pape François au Peuple de Dieu).

P. Olivier Joncour
Is 35, 4-7 ; Ps 145 ; Jc 2, 1-5 ; Mc 7, 31-37