La rencontre improbable Homélie 3° dimanche de Carême A (23.03.2014)

3° dim Carême A 23 mars 2014 St Pierre St Paul de Colombes

 La rencontre improbable

Après les tentations de Jésus au désert, puis la transfiguration de Jésus devant Pierre, Jacques et Jean, dans l’évangile de St Matthieu, nous allons ouvrir celui de St Jean pour les 3 prochains dimanches. Aujourd’hui, c’est la rencontre de la Samaritaine avec Jésus, le Dieu faible, près d’un puits.

La Samaritaine

« Je suis femme et même pleinement femme, avec tout ce fait ma vie, ou plutôt mes multiples vies, si difficile à comprendre pour un homme : fille, femme, épouse, mère, grand-mère, travail, amis, copines, vie spirituelle, … Je ne suis pas juive. Je suis une Samaritaine, pour les juifs une hérétique qui ne reconnaît que les cinq premiers livres de la Bible. Comment ! Toi qui es juif, tu me demandes à boire, à moi une Samaritaine ?

Je ne suis pas mariée, même si j’ai un compagnon. Pas mariée, mais divorcée cinq fois ! Je recherche le grand amour. Quelque chose est faussée. Je répète toujours la même histoire. Et pourtant, je peux peut-être essayer quelque chose de nouveau avec cet étranger, avec cet inconnu au regard clair et pur. Au moins avec lui, je n’ai pas l’étiquette que les gens de son village m’ont collée. En cet homme, il y a quelque chose de pur, qui dépasse mes échecs et mes déceptions.

Autant les fils d’Israël ont eu soif au désert, autant de mon côté, j’ai oublié que j’avais soif d’absolu. A force de vivre uniquement à fleur de peau, j’ai posé un couvercle sur la source divine qui désire couler à flot. »

Nous sommes tous des Samaritaines et il y en a autour de nous. Dans leur message final au synode de la nouvelle évangélisation en octobre 2012, les évêques écrivaient : « il n’y a pas d’homme ou de femme qui ne se trouve, à un moment ou à un autre de sa vie, […] près d’un puits avec une cruche vide et l’espérance de trouver la réalisation de l’aspiration la plus profonde du cœur, la seule qui puisse donner sa pleine signification à l’existence. » (26.10.2012) Quelle est la Samaritaine qui vient vers moi ?

Jésus est le Dieu faible

Jésus se repose au puits de JacobJésus est fatigué par la route. Par la chaleur sûrement aussi. Il a soif. Il n’a rien pour puiser ni pour boire. Il se fait mendiant auprès de cette femme : Donne-moi à boire. Il se fait proche de celle que les femmes de son village tiennent à distance de leur mari. Dans le dialogue avec la femme, Jésus donne soif à celle qui avait perdu le goût de l’eau vive. Il révèle la soif. Il vient aussi étancher la soif. Jésus n’est pas exclusif : après avoir permis à la femme de le reconnaître comme le Messie, il se laisse inviter par les habitants du village, car il veut se faire connaître du plus grand nombre. Et pour cela, il n’est pas allé rencontrer les personnes influentes du village. Au contraire, il a décidé de se laisser rejoindre par cette femme. Quand me suis-je approché plus de Jésus ?

Jésus a aussi décidé de ne compter que sur le seul témoignage de la femme. « De l’accueil du témoignage, les gens passeront à l’expérience personnelle de la rencontre : ‘ce n’est plus à cause de ce que tu nous as dit que nous croyons maintenant ; nous l’avons entendu par nous-mêmes, et nous savons que c’est vraiment lui le Sauveur du monde.’ » (idem) A qui ai-je permis de mieux connaître et rencontrer Jésus grâce à mon témoignage ?

Le puits

le puits, lieu de rencontre des femmesLe puits est un lieu de rencontres. D’ordinaire, les femmes y venaient  à l’aube. Il est le symbole de la prière. Le Seigneur nous dit : « Descends en toi, je suis présent au plus intime de toi. Arrête-toi. Assieds-toi au calme. Je t’attends. »

« Aujourd’hui, nombreux sont les puits qui s’offrent à la soif de l’homme, mais un discernement est nécessaire afin d’éviter des eaux polluées. […] Comme au puits de Sychar, l’Eglise ressent le devoir de s’asseoir au côté des hommes et des femmes de notre temps, pour rendre présent le Seigneur dans leur vie, afin qu’ils puissent le rencontrer. » (idem)

cruche laissée par la SamaritainePour conclure, si la tentation de ce dimanche est de penser que le Seigneur nous a piégés et nous a abandonnés en plein désert comme les hébreux, ou qu’Il nous a oubliés, rappelons-nous ce qu’Il a fait à Massa et Mériba. Il est Dieu-avec-nous tous les jours (cf Mt 28,20b). Et quand nous avons l’impression de ne servir à rien, de ne compter pour personne, d’être comme la cruche que la Samaritaine a laissée, nous pouvons dire cette prière dite de la petite cruche :

"Seigneur, excuse-moi si je te dérange ! Il m'est venu à l'idée tout à l'heure que tu avais peut-être besoin d'un saint...  Alors, je suis venu pour la place, je ferai très bien l'affaire ! Quoi qu'on en dise, le monde est rempli de gens parfaits. Il y en a qui vous offrent beaucoup de sacrifices et, pour que tu ne te trompes pas en les comptant, ils les marquent avec une petite croix sur un carnet. Moi, je n'aime pas faire des sacrifices. Ça m'ennuie énormément. Ce que je t’ai donné, Seigneur, tu sais bien que tu l'as pris sans permission. Tout ce que j'ai pu faire, c'est de ne pas rouspéter...

Il y a aussi des gens qui se corrigent d'un défaut par semaine. Ils sont forcément parfaits au bout d'un trimestre. Moi, je n'ai pas assez confiance en Toi pour faire ça. Qui sait si je vivrais encore au bout de la première semaine? Tu es si imprévisible, si impulsif, mon Dieu ! Alors, j'aime autant garder mes défauts... en m'en servant le moins possible.

Les gens parfaits ont tant de qualités qu'il n'y a plus de place en leur âme pour autre chose. Ils n'arriveront jamais à être des saints. D'ailleurs, ils n'en ont pas envie... de peur de manquer à leur humilité.

Mais, Seigneur, un saint, c'est un vase vide avec un peu de boue au fond. Ce n'est pas propre, je le sais bien... Si tu ne veux pas de moi non plus, Seigneur, je n'insisterai pas. Réfléchis pourtant à ma proposition, elle est sérieuse. Quand tu iras dans ta cave, rappelle-toi que Tu as, quelque part sur la terre, une petite cruche à ta disposition!..."

Ex 17, 3-7 ; Ps 94 ; Rm 5, 1-2.5-8 ; Jn 4, 5-42

P. Olivier Joncour

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