Faire de la terre le plus bel endroit du Royaume des cieux Homélie Messe Veillée de Noël (24.12.2013)
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Mardi 24.12.2013 Veillée de Noël 21h St PP Colombes
Faire de la terre le plus bel endroit du Royaume des cieux
Dans notre route vers Bethléem, au cours des 4 dimanches de l’Avent, nous avons fait étape dans 4 auberges. Ce soir en arrivant à Bethléem, il n’y a pas de place dans la salle commune, même pour un jeune couple dont la femme est enceinte, sur le point d’accoucher !
Deux films américains sortis ces dernières semaines, ‘Gravity’ et ‘All is lost’, sont des paraboles de la vie de notre monde. ‘Gravity’ raconte l’histoire d’une femme cosmonaute perdue dans l’espace qui se demande comment elle va revenir sur terre alors que la navette spatiale a été détruite et que sa réserve d’oxygène diminue dangereusement. ‘All is lost’ est l’histoire d’un homme seul sur son bateau dont la coque a été percée par un container à la dérive, en plein Océan Indien. Il se demande comment il va survivre dans une violente tempête sans radio ni matériel de navigation, au milieu des requins, sous un soleil implacable, avec des maigres réserves. Comme deux paraboles pour décrire notre monde à la dérive, en perdition. D’où viendra alors le salut ? D’eux-mêmes ? D’autres hommes ? De Dieu, on ne sait jamais ? Du ciel ? De la mer ? De la terre ? D’un Super-Héros sauveteur ?
Dieu a voulu sauver une humanité à la dérive, en perdition non pas dans l’espace de notre galaxie, ni sur les océans, mais sur le sol de la terre, en dérapage mal contrôlé vers la mort à cause de toutes les situations où l’être humain, enfant, adolescent ou adulte, refuse d’aimer, au point que l’Homme est devenu son pire ennemi. Rappelons-nous les deux frères*, Caïn et Abel (Gn 4). « L’Homme est [devenu] un loup pour l’Homme » (Plaute), alors que Dieu désirait qu’il devienne comme Lui et prenne part à sa Vie divine. Une première fois, le Seigneur Dieu avait sauvé Noé et sa famille avant de recourir au déluge. Mais Il promit de ne plus recommencer en laissant le signe de l’arc-en-ciel (Gn 6-9).
Plus tard, dans une concertation dont Dieu a le secret, il décida d’appeler des prophètes pour rappeler à son peuple l’Alliance qu’il avait conclue au Sinaï. Ce fut insuffisant. Dans une réunion au sommet entre le Père, le Fils et l’Esprit, il fut décidé, de façon encore plus grandiose que la plus grosse réalisation hollywoodienne jamais réalisée, bien avant qu’une compagnie aérienne ait voulu « faire du ciel le plus bel endroit de la terre » (Air France), que la terre deviendrait le plus bel endroit du Royaume des cieux pour y « dresser sa tente parmi nous » (Jn 1,14a) pour habiter et vivre au sein de notre humanité. Pour cela, le Fils accepta d’être envoyé pour une mission terrestre unique spéciale. Il restait encore à convaincre une jeune fille juive de donner son humanité au Fils éternel.
Cette mission fut confiée à l’archange Gabriel qui se rendit auprès de Myriam qui donna son accord. Joseph, à qui elle était promise en mariage, accepta aussi le rôle de père adoptif. Le Sauveur était un nouveau-né ! Quel ne fut pas l’étonnement des bergers ! Dieu petit enfant, faible, fragile entre les mains d’un homme et d’une femme. Dieu silence. Dieu à la merci de la bonté et/ou de la méchanceté des hommes. Un pari de plus du côté de Dieu en faveur de l’Homme.
Les ‘Oui’ de Marie, puis de Joseph, préparaient le ‘Oui’ du Fils à son Père, sur la croix. A la 1° naissance à Bethléem où l’enfant est souvent représenté dans les langes, couché dans une auge en pierre, correspond l’homme mort dans un linceul, couché dans un tombeau. A la naissance dans l’auge-mangeoire, d’où l’enfant s’est levé et s’est fait nourriture par ses discours, ses paraboles et ses miracles, correspond la renaissance et le réveil du sommeil de la mort de l’homme crucifié du tombeau, pour l’éternité.
La lumière qui s’est levée et qui a éclairé le peuple qui marchait dans les ténèbres et les bergers, a rayonné sur le Mont Thabor, et à Jérusalem, le troisième jour. Elle continue à rayonner grâce à la ‘Lumière de la Foi’ (Pape François, Encyclique, 29.06.2013) et donne naissance sur les 5 continents à ‘La joie de l’Evangile’ (Pape François Exhortation apostolique, 24.11.2013).
Comment alors le petit bébé divin vient-il faire « toutes choses nouvelles » (Ap) ? Comment nous aide-t-Il à vivre entre nous ?
Cette nuit-là, personne n’a été prêt à faire un peu de place pour accueillir ce couple de Nazareth, en Galilée, alors que Bethléem est en Judée. En plus, ce recensement, était demandé par les Romains qui occupaient la Palestine. Au moins 2 raisons pour ne pas faciliter les choses. Plus grand, Jésus a appelé des hommes et des femmes si différents à le suivre, y compris chez ses apôtres. Ce soir, nous retrouverons des personnes de notre famille avec qui nous nous entendons bien, et d’autres avec qui nous sommes en froid ! Ce soir, oserons-nous faire un pas vers ces dernières ?
Comment le bébé divin nous aide-t-Il à regarder vers les autres ?
Cette nuit-là, personne n’a voulu voir Joseph et Marie. Cette nuit-là, avec ce jeune couple, un âne et un bœuf ont été les premiers témoins de la naissance de Jésus, du « Seigneur-sauve ». Plus grand, il a toujours regardé vers les malades, aveugles, sourds, paralysés, et autres collecteurs d’impôts et prostituées de son temps. Il y a quelque jours, nous avons vu les Joseph et Marie de notre temps, dans les camps de réfugiés syriens sous la neige. En sortant pour rentrer bien tranquillement chez nous pour réveillonner, nous croiserons peut-être un homme, une femme dort dans la rue. Les regarderons-nous ? Les inviterons-nous ?
Comment le bébé divin nous aide-t-Il à agir avec les autres ?
Cette nuit-là, personne n’a lancé une alerte sur Facebook, ni signé une pétition, ni organisé une manifestation pour réquisitionner une chambre chez l’habitant. « Il est venu chez les siens et les siens ne l’ont pas reçu. » (Jn 1,11) Ce soir, que déciderons-nous de faire avec d’autres pour rendre notre terre, notre pays, notre ville, notre famille plus humains, plus accueillants pour tous, à commencer par toi le pauvre, mon frère ?
Fêter Noël, célébrer la naissance humaine du Fils de Dieu, ne peut pas seulement consister à le regarder venir vers nous, s’il vient bouleverser notre vie et celle du monde, s’il vient apporter la Lumière et la Joie, une jeune femme juive hollandaise, dans les années 40, se demandait un jour à genoux dans sa salle de salle de bains : « qu’est-ce que je peux faire pour aider Dieu ? » (Etty Hillesum Une vie bouleversée) Que pouvons-nous faire pour aider Dieu ?
Is 9, 1-6 ; Ps 95 ; Tt 2, 11-14 ; Lc 2, 1-12
P. Olivier Joncour
*Lire le n°2 du Message du Pape François pour la 47° Journée Mondiale de la paix sur la Fraternité, fondement et route de la paix (1.01.2014).