Le buisson, le rocher, le figuier et le fumier Homélie 3° dim Carême C (20.03.2022)
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Dimanche 20 mars 2022 3° dim Carême C Gennevilliers
Le buisson, le rocher, le figuier et le fumier
Qu’avez-vous remarqué d’extraordinaire dans les extraits de la Bible que nous venons d’écouter ? Pour ma part, ce sont les végétaux et les minéraux : le buisson qui brûle sans se consumer, puis un rocher qui devient une fontaine itinérante, et enfin un figuier près d’une vigne.
Commençons par le buisson que Moïse voit en train de brûler sans se consumer, ce qui attire son regard et qui lui fait faire un détour. Et c’est depuis le buisson, qu’un ange du Seigneur qui devient le Seigneur lui-même parle à Moïse, lui révèle son Nom, car notre Dieu n’est pas muet ! C’est pourquoi, s’il est important de Lui parler dans notre prière, de Lui présenter nos demandes, nos merci et nos pardon, il est encore plus important de Lui laisser du temps de nous parler, en L’écoutant, comme nous avons pu en faire l’expérience de façon plus particulière en petits groupes puis personnellement lors de la première formation des Vendredis de Carême pour débutants sur la prière avec la Parole de Dieu, le 4 mars.
Notre Dieu n’est pas indifférent à ce que nous vivons : Il n’est pas seulement un Dieu qui parle, mais aussi un Dieu qui écoute et qui voit. Les hébreux, esclavages en Egypte, ont fait monter vers le Seigneur, le Dieu des patriarches Abraham, Isaac et Jacob, leurs cris de détresse, leur SOS, leur appel à l’aide. Et voici sa réponse : J’ai vu, oui, j’ai vu la misère de mon peuple qui est en Égypte, et j’ai entendu ses cris sous les coups des surveillants. Oui, je connais ses souffrances.
Et le Seigneur n’a pas déclenché le plan ORSEC, mais mis en place un meneur pour organiser « La grande évasion ». Je suis descendu pour le délivrer de la main des Égyptiens et le faire monter de ce pays vers un beau et vaste pays, vers un pays, ruisselant de lait et de miel. Maintenant donc, va ! Je t’envoie chez Pharaon : tu feras sortir d’Égypte mon peuple, les fils d’Israël.
Après le buisson ardent, il y a un rocher qui a servi à tout un peuple qui avait soif de boire dans le désert. En effet, après Massa et Mériba où les hébreux ont eu soif et faim, récriminant et gémissant contre le Seigneur. Ils avaient la nostalgie de l’Egypte où ils mangeaient à leur faim et où ils étaient esclaves. Tous, ils ont mangé la même nourriture spirituelle, tous, ils ont bu la même boisson spirituelle ; car ils buvaient à un rocher spirituel qui les suivait. C’est le rocher sur lequel Moïse avait frappé avec son bâton et d’où il est sorti de l’eau ; Et plus extraordinaire encore, ce rocher se déplaçait. Ce rocher, pour le psalmiste, c’est le Seigneur sur lequel on peut construire la maison de sa vie (cf Mt 7, 24-25). C’est le Christ, écrit St Paul.
Après le minéral du rocher, nous revenons au végétal avec un arbre, un figuier planté dans une vigne. En principe, il produit des fruits, des figues. Mais voici qu’il n’y en a pas un pour la 3° année consécutive. C’est pourquoi le propriétaire veut le couper. Pourtant, le vigneron lui demande un délai d’une année. Cela lui laissera le temps de bêcher et d’y mettre du fumier pour lui apporter de l’engrais nécessaire à nourrir et fortifier le figuier. Il veut lui donner une dernière chance. On entend encore parfois l’insulte « quel fumier ! » En principe c’est négatif. Il y a une manière de l’accueillir positivement comment étant ce qui va permettre d’enrichir et de nourrir une situation de mort et produire quelque chose de bon à partir de ce qui n’est pas attirant et qui ne sent pas bon !
A certains moments de notre vie, nous sommes comme ce figuier qui ne porte plus de fruits. Et nous avons la chance d’avoir un défenseur, un vigneron divin qui nous donne une chance de nous convertir si nous en prenons aussi les moyens. Car il ne peut agir sans nous ni contre nous. Je pense aussi à tous ces parents qui voient leurs enfants s’éloigner de la foi et de l’Église dans lesquelles ils les ont élevés. Quelle peut être leur prière ? Elle doit ressembler à celle de Ste Monique qui a prié des années pour que son fils Augustin retrouve le chemin de vie du Christ ressuscité. Pour elle, ce fut une croix, mais sa prière persévérante a été exaucée. Et le fumier dont le Dieu-vigneron s’est servi (cf Jn 15,1), c’est d’un grand chrétien, l’évêque de Milan, St Ambroise qui a répondu à la soif et à la faim spirituelle d’Augustin et qui les a canalisées et nourries avec les ressources que Dieu donne dans la vie de l’Église et la foi chrétienne.
Quand, au début de l’évangile, Jésus demande à ses auditeurs de se convertir, ce n’est pas tant changer de religion, que de commencer à changer de vie pour la rendre conforme à ce que Dieu demande et attend. Ce n’est pas seulement une demande qu’il adressait à ceux de son époque, mais aussi à chaque génération. C’est à chaque carême que c’est appel à mettre notre vie en conformité avec l’Evangile, avec les béatitudes, avec le triple commandement d’aimer le Seigneur, notre prochain comme nous-même. C’est ce que nous avons entendu le mercredi des cendres : « Convertissez-vous et croyez à l’Evangile. »
Le carême a commencé il y a déjà 16 jours. Il en reste 24. Où en suis-je de ma conversion ? Qu’est-ce qui est mort dans ma vie ? Qu’est-ce qui a besoin d’être réveillé et ressuscité ? Qu’est-ce qui a besoin d’être renouvelé et transformé ? De quel fumier spirituel ai-je besoin pour porter à nouveau des fruits ? Prions les uns pour les autres pour accueillir son pardon.
Ex 3, 1-8a.10.13-15 ; Ps 102 ; 1 Co 10, 1-6.10-12 ; Lc 13, 1-9
P. Olivier Joncour