Une étoile et la Bible comme boussole Homélie Epihanie (7.01.2018)
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Dimanche 7 janvier 2018 Epiphanie St PP Colombes
Une étoile et la Bible comme boussole
Cette rencontre entre ces mages et le roi d’Israël n’a pas laissé de trace dans les livres d’histoire de la diplomatie mondiale. Seul un chrétien d’origine juive, Matthieu en a gardé le récit de cette rencontre avec des païens.
Pour se diriger sur la route, on fait confiance à des panneaux directionnels. Les accrocs à la technologie font confiance à leur GPS ou à Waze. A une autre époque et sur une terre lointaine, des mages ont commencé à suivre une étoile nouvelle qui indiquait la naissance d’un roi. Ils ont tout laissé et se sont mis en route pour aller le voir. De l’Orient à Jérusalem, cette étoile a été leur guide. A la capitale, comme on dirait à Londres pour l’Angleterre ou à Madrid pour l’Espagne aujourd’hui, ils se sont arrêtés au palais du roi, pensant trouver le nouveau-né. Alors que les mages ont demandé où était né le roi des Juifs. Hérode a traduit : « Où doit naître le Christ ? » Intéressant !
A partir de Jérusalem, c’est la Parole de Dieu qui donne la destination, une prophétie de Michée. Et nous, quels moyens nous donnons-nous pour lire la Bible, et/ou devenir plus familiers de la Parole de Dieu ? Il existe une appli qui permet de lire la Bible en un an. Mais elle est en anglais. J’ignore s’il existe l’équivalent en français. Dans notre Eglise, il y a les groupes mensuels ‘Partager la Parole’ autour d’un texte biblique.
Dans ce récit, quelque chose de mystérieux m’étonne : ceux qui étaient les ignorants et les moins préparés sont les plus convaincus : les mages qui n’étaient pas connectés à la Bible vont à Bethléem, alors que ceux qui l’étaient, les prêtres et les scribes n’ont pas bougé, alors que Bethléem est à une heure de marche de Jérusalem. Sans doute que ceux qui sont les plus près de Jésus ne sont pas ceux auxquels on pense immédiatement.
Face à une même situation, les réactions peuvent être si différentes : les uns sont bouleversés, Hérode et Tout Jérusalem, alors d’autres se réjouirent d’une très grande joie, les mages ayant retrouvé l’étoile à la sortie de Jérusalem. Les uns sont figés tandis que les autres sont en mouvement, en route.
Qui est cet enfant dont on célèbre encore la naissance plus de 2000 ans après ? Qui est cet enfant que des inconnus venus de loin sont allés voir alors qu’ils n’étaient pas de sa famille ? Ils ne savaient pas qu’on attendait cette naissance depuis des siècles, qu’il serait roi, mais d’une façon si différente de celle dont les rois agissaient habituellement : il n’avait aucun des attributs : pas de palais, pas de couronne, pas de richesse, pas d’armée. Et pourtant, il a parlé du Royaume de Dieu avec des paraboles, un royaume sans frontières.
Si nous avions été un des mages, quel cadeau aurions-nous apporté ? Imaginons que nous soyons un enfant qui se serait faufilé dans la caravane des mages, se rendant compte que chacun des grands avait préparé un cadeau pour ce roi dont l’étoile était apparue dans le ciel quelques nuits auparavant. Ils avaient essayé de le décourager : trop petit, trop loin, trop fatigant. Lui ne savait que lui donner, si ce n’est ses mains, son cœur. Sa mère avait eu le cœur déchiré de voir son fils partir à l’aventure. Elle n’était pas riche.
Soudain, elle se rappela qu’elle avait une tenture multicolore qu’elle lui destinait. Elle la lui remit en lui disant : ‘Mon fils, je vais te dire comment je l’ai tissée pour qu’elle soit à toi. Mais si tu le veux, si ton cœur veut la donner, tu es libre de partir et de la donner à ce nouveau roi. Elle est unique. Dans ma vie, j’ai rencontré des hommes et des femmes qui m’ont donné les fils de couleur avec lesquels j’ai créé cette tenture. Ils y ont mis leurs joies et leurs espérances, leurs peines et leurs larmes. Ce roi comprendra d’où vient cette tenture.’
C’est la tenture de Maria. Elle vient d’une île au large de l’Afrique où l’on parle portugais. A chaque fois qu’elle va voir sa famille, elle a des sacs de vêtements pour ceux de son village qu’elle reconnaît de moins car la violence et la drogue défigurent les jeunes qui sont fascinés par ces mirages. Elle souffre de voir tant de personnes à l’esprit anesthésié : ils s’éloignent de Dieu, celles qui tuent la vie de l’enfant dans leur ventre et ceux qui offensent Dieu, aveuglés par l’orgueil. Son fil est violet, la couleur de l’attente.
C’est la tenture d’Ausenda. Elle souffre de la tête aux pieds. Elle a plus de médicaments et de maladies qu’aucun médecin ne peut l’imaginer. Et pourtant, elle tient debout. Elle avance avec ses deux canes. C’est le Seigneur qui l’a fait marcher. ND de Fatima n’a pas de secret pour elle, celle de Lourdes non plus. Elle m’a donné un fil bleu, la couleur du ciel.
C’est la tenture de Karim-Mickaël. Il aime beaucoup lire. Il n’aime pas beaucoup qu’on le dérange ni qu’on parle fort près de chez lui. En ce moment, il est souvent sous une grosse couverture car il fait froid, c’est l’hiver. Il aime venir prier dans la chapelle et allume souvent une bougie. Il m’a donné un fil gris, la couleur de la pauvreté.
C’est la tenture de Maurice. Il ne sait pas écrire. Il lui manque quelques dents quand il sourit, mais il est toujours prêt à rendre service, à aider pour déménager des meubles, à préparer un repas, les tables et les chaises. C’est le fil rouge, celui de l’amour chaque jour.
Tu vois, mon fils, avec ces couleurs et tous ces petits gestes, chaque jour, heure par heure, j’ai tissé la tenture. »
Cette nuit-là, après leur pause au palais d’Hérode dont il ne comprenait pas la langue – c’était de l’hébreu pour lui ! - l’étoile les a guidés jusqu’à la maison de Bethléem, celle où dormait le roi du monde dont Joseph et Marie s’occupaient avec tant d’amour et de soin. Ils l’appelaient ‘mon Trésor si précieux’, ‘le Fils du Très haut’ alors que Joseph n’était pas très grand, ‘mon petit Agneau’. Les mages ont offert l’or, l’encens et la myrrhe, et moi, j’ai dit : « Voici la tenture que ma maman a tissée pour toi. » Il s’est réveillé. Un grand sourire est apparu sur son visage : la tenture était chaude et très colorée. Marie m’a dit : « Sans en savoir le prix, Jésus a saisi pour la première fois, à pleines main, la vie des hommes pour qu’elle devienne sa joie. » Et il s’est endormi en souriant.
Après la rencontre de Jésus de Jésus, le retour est différent. Forcément !
Is 60, 1-6 ; Ps 70 ; Ep 3, 2-3a.5-6 ; Mt 2, 1-12
P. Olivier Joncour